Qu’est-ce que le contrat d’engagement de service public pour un médecin hospitalier ?
Le désert gagne. Depuis quelques années en effet, un nouveau type de déserts, médical cette fois, s’étend petit à petit à tout l’Hexagone. Les régions sont en effet de plus en plus nombreuses à ne plus pouvoir offrir à leurs populations les soins dont elles ont besoin. Pis : à ce problème d’ordre quantitatif s’ajoute un autre, qualitatif celui-ci, puisque ce sont quelques spécialités médicales qui manquent de praticiens. Il devient par conséquent difficile de soigner certaines pathologies, tout simplement parce qu’il n’y a pas de médecin spécialiste. Et pour corser encore l’affaire, il arrive souvent que ces deux maux se conjuguent.
Pour tenter d’y remédier, les pouvoirs publics ont pris un certain nombre de mesures, en particulier la création d’un Contrat d’engagement de Service Public (CESP), créé dans le cadre de la loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST), élaborée en 2009.
Le Contrat d’Engagement de Service Public, qu’est-ce que c’est ?
Un contrat, quel que soit le contexte dans lequel il est signé, engage deux parties. La première est celle qui propose quelque chose, la seconde celle qui accepte et signe pour ce quelque chose. En l’occurrence, ce sont les pouvoirs publics qui proposent et s’engagent à accorder un certain nombre de facilités, de soutiens et d’aides diverses à des étudiants en médecine et en odontologie, autrement à celles et ceux qui se destinent à la profession de dentistes. Quelles sont précisément les clauses d’un contrat d’engagement de Service Public ? Comme son intitulé l’énonce, on ne peut plus clairement, il s’agit pour les étudiants en médecine et odontologie de s’engager à remplir une fonction de service public. Concrètement, les signataires donnent leur accord pour travailler dans des spécialités médicales ou des zones géographiques où la continuité des soins est menacée. En d’autres termes, il s’agit pour eux d’accepter d’exercer une spécialité qui manque de praticiens et de s’installer dans une région, un département où une ville de l’Hexagone au sein desquels la population ne peut pas être correctement soignée, faute de médecin. Voilà pour le volet étudiant et pour les engagements pour lesquels ils signent. Mais qu’en est-il de ceux de l’autre partie, autrement dit de l’État ?
Les modalités d’application du CESP
Pour convaincre des étudiants de s’installer dans une ville ou un village qu’ils n’auraient a priori pas choisi, ou pour y exercer une spécialité qui n’était pas nécessairement leur premier choix, les pouvoirs publics jouent l’incitation financière. En effet, en échange de l’installation dans un « désert médical » et de l’exercice d’une spécialité déficitaire, ils proposent de verser la somme de 1 200 euros brut par mois à chaque étudiant, cela à partir de la deuxième année — la première est exclue du dispositif — jusqu’à la dernière année d’internat. Pour les futurs dentistes, le versement de l’allocation mensuelle s’effectue de la deuxième année là aussi, mais jusqu’à l’année du 3e cycle court.
Pendant combien de temps les médecins généralistes, spécialistes et dentistes qui ont bénéficié de cette allocation doivent-ils ensuite exercer dans la zone médicalement déficitaire ? Une fois qu’ils ont un emploi, ils doivent respecter leur engagement de service public pendant une durée égale à celle au cours de laquelle ils ont perçu l’allocation, avec une durée minimale d’engagement de deux ans. Mais ce n’est pas la seule obligation. Les praticiens qui ont signé un CEST doivent, comme précisé préalablement, choisir leur lieu d’exercice professionnel au sein d’une liste nationale, établie en fonction des besoins médicaux des différentes régions de l’Hexagone. En outre, ils doivent aussi respecter les tarifs conventionnés — exercice libéral en secteur 1 — et, pour ce qui est de la chirurgie dentaire, ils doivent exercer dans le cadre des conventions.
Le CESP, un moyen de démocratiser les études de médecine ?
Si l’objectif initial du Contrat d’engagement de service public pour un médecin hospitalier est d’enrayer la désertification médicale à l’œuvre un peu partout en France, ce contrat possède également d’autres vertus. Il revêt ainsi un aspect social indéniable, puisque grâce au soutien financier apporté par l’État, ce contrat aide certains étudiants à poursuivre leurs études. Ou, au moins, à les suivre dans de meilleures conditions. Les études de médecine sont en effet longues et exigeantes ; elles nécessitent que l’on s’y consacre entièrement. Par conséquent, celles et ceux qui doivent travailler pour subvenir à leurs besoins sont défavorisés par rapport aux autres qui sont, notamment, soutenus par leur famille. À ce titre, le CESP peut permettre d’ouvrir les études de médecine à un public plus large qui, sans ce contrat passé avec l’État, y aurait renoncé pour des questions matérielles ou financières. Margé parfois de réelles vocations, des désirs forts et sincères de mener des carrières médicales.
Des travaux de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), publiés en 2015, ont révélé que les études de médecine figuraient parmi les plus inégalitaires socialement, avec les classes préparatoires aux grandes écoles. Les conclusions de ces travaux étaient on ne peut plus claires : un enfant de cadres a deux à trois fois plus de chances de devenir médecin — ou spécialiste, dentiste — qu’un autre issu d’un milieu ouvrier. Grâce à l’allocation versée par l’État dans le cadre du CEST, les étudiants issus de milieux modestes ou très modestes peuvent, désormais, envisager d’entamer ce long cursus universitaire, puis de se concentrer sur leurs révisions et leurs examens, sans devoir se soucier de leur subsistance quotidienne. Et ce même si la sélection, entre les élèves socialement favorisés et les autres, s’effectue également à l’issue de la première année. À cet égard, le CEST n’est d’aucun secours.
Pour finir, on peut se demander si, via ce contrat, ce ne sont pas uniquement les étudiants issus de milieux défavorisés qui risquent à terme d’exercer dans des zones elles aussi défavorisées, pour des patients qui le sont tout autant. Ou s’ils ne seront pas contraints de choisir des spécialités moins « porteuses » et moins rémunératrices, laissant à d’autres les professions les plus lucratives. Peut-être. Mais si le Contrat d’Engagement de Service Public redonne des chances à ces étudiants et, surtout, s’il permet à tous les Français d’être soignés correctement.
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